Entreprise

« Ne traitez pas les freelances comme des salariés ! », Rémi Rivas

Rémi Rivas est designer indépendant, spécialisé dans l’accompagnement des projets d’innovation. Il participe à l’implémentation d’incubateurs et d’accélérateurs et au lancement de nouveaux produits et services. Il est aussi enseignant à HEC Paris et mentor auprès de l’incubateur HEC à Station F. Mais ce n’est pas tout :  il accompagne bénévolement de nombreux freelances en proposant du contenu et des formations gratuites disponibles sur remirivas.com et lemodedemploi.fr. A l’occasion de notre enquête sur« Les grands groupes qui font rêver les freelances », il nous a livré sa vision de la relation entre freelances et grandes entreprises.

En tant que freelance, quel regard portez-vous sur les missions dans des grands groupes versus les missions dans des structures plus petites ?

Dans les grandes entreprises, il est souvent difficile d’avoir accès aux personnes véritablement décisionnaires. Il n’est pas rare que le client n’ait pas de vraie marge de manœuvre sur la conduite du projet. Cela peut devenir rapidement frustrant, surtout lorsqu’il s’agit de dépasser les préconisations et de produire quelque chose de fonctionnel.

A contrario, l’avantage dans les ETI ou grosses PME, c’est que la pyramide hiérarchique est simple : on est en contact direct avec le comité de direction, les décisions sont plus faciles, les effets plus rapides. On « sent » l’impact qu’on a sur l’organisation pour laquelle on travaille.

Personnellement, je suis plus intéressé par les missions sur lesquelles la capacité décisionnelle de mon interlocuteur est importante, ce qui est souvent compliqué dans les grands groupes où le top management verrouille les décisions mais ne pilote pas les projets en direct. Il devient alors souvent difficile de travailler efficacement.

Mais il y a un autre critère que je regarde de près : l’ambition du projet. Le fait que les conditions soient réunies pour que la prestation demandée ait un véritable impact. Outre la satisfaction intellectuelle, c’est également plus payant en termes de visibilité et de notoriété à long terme. En cela, les grands groupes ont un avantage : les réalisations pour eux sont de véritables cartes de visite pour des projets ultérieurs.

Finalement, quels sont vos critères prioritaires dans vos recherches de mission ? Et que cherchez-vous absolument à éviter ?

Les critères que je vais regarder en priorité sont avant tout le TJM (taux journalier moyen), la nature de la mission et la durée d’engagement. En effet, je n’ai pas envie d’être à 100% de mon temps sur le même projet, ni de travailler “en régie” pendant de longues semaines. Je vends avant tout du résultat et je ne travaille qu’en mode projet sur une durée qui ne dépasse généralement pas les 6 mois. Je refuse également les missions “sur site” qui nécessitent une présence continue dans les bureaux du client. Elles sont trop exigeantes en termes de transport et empêchent la prospection en cours de mission.

La plupart de mes clients ne s’intéressent pas à comment j’organise mon temps. Tout ce qu’ils veulent c’est que le livrable demandé soit livré dans les délais et ça me va très bien !

Quels conseils donneriez-vous donc aux grands groupes pour se rendre plus attractifs auprès des freelances ?

Le principal enjeu des grands groupes, c’est de faire en sorte que leurs missions ne présentent pas des contraintes proches de celles d’une activité salariée. Car c’est généralement ce que les freelances essayent avant tout d’éviter.

Je conseillerais avant tout aux grands groupes de proposer un cadre de mission qui ne requiert pas de présence sur site ou de mise à disposition permanente du freelance sur un temps très long. Cela est relativement nouveau pour ces entreprises qui ont l’habitude de travailler exclusivement avec des profils internalisés. C’est pourquoi elles doivent s’équiper de vrais gestionnaires de projets capables de sourcer une compétence externe, de la contractualiser mais surtout de la superviser sans répliquer un mode managérial de contrôle comme on le ferait habituellement avec un salarié.

Ensuite, il serait intéressant de diminuer les contraintes administratives inhérentes aux collaborations entre freelances et grands groupes en mettant en place des contrats types qui ne nécessitent pas autant de relecture et de négociation par exemple.

Dernier point à souligner : ne pas oublier que le premier vecteur d’acquisition de freelances sont les indépendants déjà en mission dans l’entreprise ! Ce sont les mieux placés pour identifier des profils adéquats et faire la promotion de la structure dans leurs cercles sociaux.

Le mot de la fin ?

Il faut surtout se souvenir d’une chose : ce qui intéresse le freelance quand il se lance en tant qu’indépendant, c’est d’être intégralement responsable de ses actions et de la qualité de ses rendus.

Il doit être en contrôle sur son périmètre d’action et, pour cela, il a besoin d’une relation d’égal à égal avec son client et pas d’une relation de subordination. Grandes entreprises, si vous voulez profiter de l’expertise de ces personnes qui ont fait le choix d’avoir le choix et avoir accès aux meilleurs profils en freelance, ne les traitez surtout pas comme des salariés !

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Quels grands groupes français font rêver les freelances ?

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