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« Le sujet de la marque employeur s’applique tout à fait aux freelances », Alexis Minchella 

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Freelance en copywriting BtoB, Alexis Minchella est aussi le créateur de « Tribu Indé », un média dans lequel il partage ses conseils pour structurer et développer son activité d’indépendant, notamment sous la forme d’un podcast, qui est devenu une référence pour les freelances. Il a également écrit son premier livre, Freelance : l’Aventure dont vous êtes le héros, publié aux Editions Eyrolles. Il nous a livré son témoignage dans le cadre de notre étude « Les grands groupes français qui font rêver les freelances ».

Lorsque leur activité marche bien, les freelances ont cette liberté de pouvoir choisir le type de clients avec lesquels ils souhaitent collaborer. Quel est l’intérêt pour un freelance de choisir de travailler avec un grand groupe ? 

Les grands groupes proposent souvent des missions de plus longue durée, permettant au freelance non seulement de mieux préparer la suite mais aussi de nouer des relations humaines intéressantes qui participent à l’élargissement de son propre réseau et carnet d’adresses pour de futurs projets.  Mais évidemment, chaque freelance a des motivations différentes. Certains veulent gagner beaucoup d’argent sur un temps très court, d’autres veulent plutôt jongler sur différents projets pour acquérir de nombreuses compétences. Pour certains, avoir des missions longues suppose parfois une exclusivité et donc l’impossibilité d’investir leur temps sur d’autres projets, ce qui n’est pas envisageable pour eux.  

Pour en revenir aux grands groupes, ils ont l’avantage d’offrir au freelance la possibilité d’évoluer dans de plus grosses équipes. Cela lui permet de se recréer une vie sociale professionnelle plus facilement, ce qui est très important quand on sait que la solitude est le gros point noir du freelancing.  

Mais pour moi, il y a un vrai sujet de défaut d’attractivité des grands groupes auprès des freelances alors même qu’il s’agit d’une ressource clé.   

Pourquoi ce défaut d’attractivité ? 

Selon moi, c’est lié aux raisons pour lesquelles les freelances se lancent en tant qu’indépendants en premier lieu : pour échapper aux contraintes d’un modèle de travail classique, avec des codes vieillissants, un deal social dont ils sont déçus, des process hyper lourds et j’en passe… Or ce sont justement ces mêmes éléments que les freelances ont l’impression de retrouver dans les missions proposées par les grandes entreprises.  

Le process en amont de la mission est souvent beaucoup trop lourd chez les grandes entreprises, en comparaison avec de plus petites structures. Les indépendants doivent souvent lire des tonnes de documents, renégocier, passer par une entreprise tierce pour se faire référencer, avoir quarante rendez-vous avant d’avoir une réponse finale… Cela peut beaucoup frustrer, d’autant plus pour les freelances qui ont d’autres opportunités en même temps. La lourdeur administrative par laquelle un freelance solo doit passer pour se faire référencer est un vrai problème.  

Il y a donc un véritable enjeu pour les grands groupes de se rendre plus accessibles et de montrer que les missions proposées en freelance ne sont pas du salariat déguisé. C’est d’autant plus nécessaire pour des missions qui ne s’intègrent pas dans un cadre de projet à gros impact.  

Quelles seraient les raisons qui détourneraient un freelance des grands groupes, au profit d’entreprises de plus petite taille ? 

L’enjeu sociétal et environnemental est une vraie tendance de fond, surtout auprès des profils juniors. Les entreprises à impact attirent indéniablement, tandis que les grands groupes ne sont pas toujours les bons élèves en termes de RSE. Or les freelances se lancent aussi en indépendant pour vivre en harmonie avec leur système de valeurs. 

Le prestige d’une entreprise ne suffit pas en tant que tel et il faut noter que le sujet de la marque employeur s’applique tout à fait aux freelances. Les meilleurs freelances, qui sont les plus sollicités, n’acceptent pas une mission juste pour un bon TJM (taux journalier moyen). De nombreux autres critères entrent en compte. S’il n’y avait que l’argent, ce serait trop simple et les grands groupes gagneraient toujours. Un des facteurs de différenciation, c’est aussi le bouche-à-oreille en tant que freelance. Les freelances discutent beaucoup entre eux. Et une entreprise qui a mauvaise réputation (process, paiement, donneur d’ordre, etc..), ça se sait très rapidement. 

Alors, comment, selon toi, un grand groupe peut-il gagner en attractivité auprès de la communauté des freelances et développer cette « marque employeur » auprès des indépendants ? 

Il faut prendre conscience que la recherche d’un freelance, comme un recrutement classique, c’est d’abord une affaire de marketing. Les mêmes codes doivent être utilisés pour attirer des salariés ou des freelances.  Il est dommage de voir qu’il n’y a, à date, aucun contenu proposé par les grandes entreprises, pour montrer comment elles collaborent avec des indépendants. Or c’est le meilleur moyen pour que les freelances puissent se projeter sur une mission.  Il faut lever ce non-dit autour du fait que les grands groupes travaillent avec des freelances : c’est un fait et il faut le célébrer plutôt que le cacher !